Interdisciplinaire et numérique au collège Jean-Baptiste Clément
Deux raisons nous amènent aujourd’hui au collège Jean-Baptiste Clément dans le 20e arrondissement : le numérique et l’interdisciplinaire. Une rencontre fructueuse !
Un vrai projet d’établissement
Le collège Jean-Baptiste Clément (on dit ici JBC) est situé dans un quartier agréable du 20e arrondissement avec une forte mixité sociale. Le collège est classé en REP ce qui lui permet de disposer de moyens complémentaires pour faire vivre de nombreux projets pédagogiques, parmi lesquels un projet phare : celui de la semaine interdisciplinaire, ou plus exactement des semaines interdisciplinaires puisqu’elles sont deux : l’une en fin d’année, juste avant les vacances de Noël, l’autre la semaine précédant les vacances de février. Pourquoi ces dates ? Simple : ce sont des semaines où les élèves sont fatigués, donc agités, difficiles à tenir, une semaine très peu rentable en matière de travail scolaire « classique ». D’où l’idée d’en faire une semaine pas comme les autres, une semaine où l’on apprend autrement. Et finalement, comme on le verra, ces deux semaines-là, les élèves travaillent vraiment et même peut-être davantage que d’habitude…
Le prétexte de cette innovation a été fourni par l’introduction dans la réforme du collège en 2016 des enseignements interdisciplinaires. Les modalités de mise en œuvre des EPI (enseignements pratiques interdisciplinaires) ont ensuite été laissées au libre choix des établissements et à JBC il a été décidé de les concentrer sur deux semaines. Tout un travail d’organisation pour l’équipe de direction et en particulier pour Audrey Maurin, adjointe du chef d’établissement, Thierry Sahuc l’an dernier remplacé par Catherine Bouffard cette année.
Audrey Maurin, adjointe du chef d'établissement
Mais l’adjointe tient à souligner que « Les projets sont impulsés par les professeurs ! C’est important de le dire. Sans leur volonté, rien ne pourrait se faire… ».
Première étape : les professeurs sont invités à concevoir des projets pédagogiques interdisciplinaires par équipes de trois à cinq. Tous ne s’y engagent pas de la même façon mais, et c’est là l’essentiel, tous participent, sans exception. La semaine interdisciplinaire est un projet global qui concerne l’établissement dans sa totalité. A chaque niveau, deux projets d’une semaine sont prévus, ce qui permet à tous les élèves de travailler sur les deux projets de leur niveau, l’un en décembre, l’autre en février.
Deuxième étape : réorganiser l’emploi du temps des professeurs et des élèves. « Cela demande un important travail de préparation : nous avons trois réunions en amont. Les professeurs décident ensemble des séances qu’ils souhaitent mettre en place, le plus souvent en co-animation. Ils me soumettent leurs propositions sous forme d’un document préparatoire. A partir de cela, je leur propose des emplois du temps ad hoc, adaptés à leurs besoins, tout en respectant le volume d’heures habituel de chacun. Comme tous les projets prévoient une production par les élèves, le plus difficile est de réserver les moyens informatiques le vendredi, quand tout le monde termine son projet. »
Et le numérique ? Et PCN dans tout ça ?
Le numérique, c’est d’abord un moyen de communication, offert ici par la messagerie de PCN à la communauté qui se mobilise. Mais c’est aussi un moyen de production. Le cahier multimédia de PCN par exemple a été le support de travail d’un projet particulièrement complet réunissant les talents d’une professeure de physique, Virginie Ducarme, d’un professeur d’anglais, Guillaume Grillet, et d’un professeur de mathématiques, Nicolas Delauzun. Leur projet « Brighton et le développement durable » inclut un travail sur la mesure de la qualité de l’air, une analyse comparative Paris-Brighton, le tout alternativement en français et en anglais avec, pour toile de fond, une réflexion sur la lutte contre la pollution et, pour finir, un voyage à Brighton avec visite d’un habitat écologique (Earthship) et promenade sur les falaises.
Guillaume Grillet, professeur d'anglais - Un extrait d'un cahier multimédia Brighton
Autre projet remarquable, Migrants, piloté par Stéphanie Pancrate, professeure d’histoire-géographie. Cela commence là aussi par une approche comparative entre la migration vers les Etats-Unis au XIXe siècle et les migrations d’aujourd’hui. Pour celles-ci, les ressources locales ont été mobilisées : grâce à des associations de quartier, des migrants de diverses origines (Asie, Afrique principalement) ont été invités au collège. Ils ont été interviewés par les élèves filmés et enregistrés : « c’était très émouvant, beaucoup d’entre eux n’avaient pas l’habitude d’être interrogés sur leur vie, leur histoire, certains et certaines étaient intarissables… Pour la deuxième semaine, l’information a circulé dans le quartier et nous avons eu encore plus de personnes migrantes qui sont venues témoigner » se souvient Stéphanie. Et pour l’année prochaine ? « Nous allons changer de sujet, nous préparons un EPI sur les Fake News ! »…
Entretien avec des migrants
Un troisième projet a donné lieu à une intense utilisation du numérique, Poésie engagée, conçu par une professeure de français (Angela Lugrin), une professeure d’arts plastiques (Guilaine Abeillé) et un professeur de musique (Julien Antona). Les élèves ont été invités à sélectionner dans un corpus de poésies celle qu’ils voulaient mettre en image et en musique. Par groupes, ils ont réalisé un clip à partir du texte qu’ils avaient choisi : composition d’un sample pour l’accompagnement, création d’une mélodie, enregistrement, recherche d’images vidéos, tournage de séquences dans le collège ou aux alentours, montage. Au total, 16 clips ont été réalisés, grâce à un investissement important des élèves, en particulier de la part de ceux qui avaient choisi de réaliser un film en stop-motion pour illustrer le poème Octobre de Pierre Seghers et qui ont dû terminer leur œuvre au-delà de la semaine interdisciplinaire.
Julien Antona, en charge de la composante musicale du projet, exploite les services de PCN dans son enseignement de façon systématique : « cette année, j’utilise Pages pour donner les liens pour toutes les musiques que nous étudions. L’apport du numérique est essentiel dans notre discipline. Les élèves y ont tous accès, de chez eux principalement ou ici au collège, nous sommes très bien équipés. »
Collège d’avant-garde
JBC est l’un des collèges parisiens ayant bénéficié d'un important équipement en tablettes dans le cadre du plan national Ecole numérique : une mallette de tablettes dans chaque classe, le raccordement haut débit à la fibre optique et un accompagnement particulièrement efficace de la Direction Académique au Numérique (DAN) et de la Direction des Systèmes d’Information (DSI) du rectorat. Mais il bénéficie surtout de l’engagement de Khaled Achiche, professeur de technologie au collège depuis plus de 15 ans et qui fait en sorte que tous les équipements fonctionnent au mieux : « Nous avons un débit de 1 Go et des bornes de bon niveau qui peuvent gérer jusqu’à 90 tablettes en même temps. Nous n’avons pas de problème. La DSI gère la flotte à distance. Cela me laisse le temps de participer à plusieurs projets interdisciplinaires avec les collègues. »
Khaled Achiche, Stéphanie Pancrate et Virginie Ducarme, professeurs de technologie, histoire-géographie et sciences physiques
Des élèves se souviennent
Khady (ex-5e), Anna, Raphaëlle et Fanny (ex-4e) se souviennent de leur participation aux semaines interdisciplinaires l’an dernier, Brighton et Migrants : « En fin d’année, on est fatiguées, c’est bien de changer, de ne pas faire toujours la même chose. Pendant la semaine EPI, il y a une bonne ambiance, tout le monde est content, l’emploi du temps est différent. Pour les migrants, on est allées au musée de l’histoire de l’immigration de la porte Dorée. Au collège, on a interrogé des immigrés. C’était très intéressant de connaitre l’histoire de ces gens. Un monsieur a pleuré en nous racontant sa jeunesse… Les dames chinoises étaient tellement contentes de parler ! On ne pouvait pas les arrêter ! Pour le montage, on a eu du mal avec les tablettes mais finalement, on y est arrivés. »
Khady de son côté a apprécié de travailler en groupe avec des professeurs qu’elle ne connaissait pas : « j’ai travaillé sur les séismes avec un professeur de SVT et un professeur d’Espagnol. A la fin, on a fait un exposé sur tout ce qu’on avait appris tout au long de la semaine. La deuxième semaine, j’ai fait l’EPI sur les JO de JBC. » Comprendre : les Jeux Olympiques de Jean-Baptiste Clément.
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